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Publié le 25 novembre 2025 à 11:35 · Temps de lecture estimé : 18 minutes

Extraction de métaux pour les VE : le vrai du faux

La transition vers le véhicule électrique est-elle réaliste d'un point de vue extraction de ressources ? Les réserves seront-elles suffisantes ? Fact-checking des critiques d'Aurore Stéphant et Guillaume Pitron avec sources scientifiques.

Florent ANGLES

Par Florent ANGLES

Extraction de métaux pour les VE : le vrai du faux

"Les voitures électriques ne sont pas écologiques, elles nécessitent des tonnes de métaux rares qu'on extrait en détruisant la planète !" C'est probablement l'une des critiques les plus répandues contre les véhicules électriques. Et elle semble logique : si on détruit l'environnement pour fabriquer une batterie, à quoi bon ?

Mais qu'en est-il vraiment ? Est-ce que la transition vers le véhicule électrique est réaliste d'un point de vue extraction de ressources ? Les réserves seront-elles suffisantes ? Et surtout : est-ce que c'est vraiment pire que le pétrole ?

Spoiler : Non, les batteries n'utilisent PAS de "terres rares" (ou très peu). Oui, il faut extraire des métaux (lithium, cobalt, nickel, graphite). MAIS : une voiture thermique consomme 50 à 80 fois plus de matières extraites sur sa durée de vie (pétrole inclus). Et les batteries sont recyclables à 95%.

Décryptage factuel, chiffré, sourcé, sans langue de bois. On démonte les mythes, on vérifie les chiffres, et on compare avec l'existant.

Première confusion massive : les "terres rares"

Commençons par clarifier la confusion N°1 qui pollue tous les débats sur les voitures électriques : les "terres rares".

C'est quoi, exactement, les terres rares ?

Les terres rares sont un groupe de 17 éléments chimiques du tableau périodique (scandium, yttrium, et les 15 lanthanides). Malgré leur nom, elles ne sont pas "rares" dans la croûte terrestre. On les trouve en quantités similaires au cuivre ou au zinc. Ce qui est rare, c'est leur concentration, ce qui rend leur extraction et purification complexes et polluantes.

📚 Les 17 terres rares

Lanthanides (15) : Lanthane, Cérium, Praséodyme, Néodyme, Prométhium, Samarium, Europium, Gadolinium, Terbium, Dysprosium, Holmium, Erbium, Thulium, Ytterbium, Lutécium

Autres (2) : Scandium, Yttrium

Source : IUPAC (Union internationale de chimie pure et appliquée)

Alors, les batteries de VE contiennent-elles des terres rares ?

Réponse simple : NON.

Composant du VE Métaux utilisés Terres rares ?
Batterie lithium-ion Lithium, Cobalt, Nickel, Manganèse, Graphite, Cuivre, Aluminium ❌ NON
Moteur électrique à aimants permanents Néodyme, Dysprosium, Terbium (dans les aimants), Cuivre (bobinages) ✓ OUI (aimants)
Moteur asynchrone ou synchrone à rotor bobiné Cuivre, Fer, Aluminium ❌ NON

Sources : Transport & Environment, ADEME, IEA

Analyse : Les batteries de voitures électriques ne contiennent AUCUNE terre rare. Seuls certains moteurs électriques utilisent des aimants permanents à base de néodyme et dysprosium (terres rares). Mais de nombreux constructeurs (Renault Zoé, Audi e-Tron, Mercedes EQE, Tesla Model 3 SR+) utilisent des moteurs sans aimants permanents, donc sans terres rares.

⚠️ Pourquoi cette confusion persiste ?

Parce que le terme "métaux rares" est souvent confondu avec "terres rares". Le lithium, le cobalt et le nickel sont parfois qualifiés de "métaux critiques" ou "métaux stratégiques", mais ce ne sont PAS des terres rares. Ils appartiennent à des catégories chimiques complètement différentes.

Quels métaux dans une batterie de VE, et en quelles quantités ?

Maintenant qu'on a clarifié la confusion sur les terres rares, passons aux métaux réellement utilisés dans une batterie de voiture électrique.

Composition d'une batterie lithium-ion type NMC 60 kWh

Métal Quantité (kg) Principaux producteurs Usage
Lithium (Li) 6-10 kg Australie (52%), Chili, Argentine, Chine Cathode (stockage d'énergie)
Cobalt (Co) 5-10 kg RDC (70%), Australie, Canada, Russie Cathode (stabilité thermique)
Nickel (Ni) 30-40 kg Indonésie (38%), Philippines, Russie, Canada Cathode (densité énergétique)
Manganèse (Mn) 10-15 kg Afrique du Sud, Chine, Gabon, Australie Cathode (stabilité)
Graphite (C) 50-70 kg Chine (70%), Mozambique, Madagascar, Brésil Anode (conductivité)
Cuivre (Cu) 15-25 kg Chili, Pérou, Chine, USA Collecteur de courant, câblage
Aluminium (Al) 20-30 kg Chine, Inde, Russie, Canada, Émirats Boîtier, collecteur de courant
TOTAL métaux batterie ~140-200 kg Pour une batterie de 60 kWh (~400 km autonomie)

Sources : ADEME, Transport & Environment, BloombergNEF, Benchmark Mineral Intelligence (2024)

Première conclusion importante : Une batterie de 60 kWh contient environ 140 à 200 kg de métaux. C'est beaucoup ? Peu ? On va comparer avec la voiture thermique.

Le choc des chiffres : VE vs voiture thermique

Voici LA comparaison que personne ne fait jamais, et qui change complètement la perspective.

Extraction sur toute la durée de vie du véhicule

Une voiture thermique consomme du pétrole en continu pendant 15 à 20 ans. Une voiture électrique utilise sa batterie UNE SEULE FOIS (puis la recycle à 95%). Calculons sur 200 000 km (durée de vie typique) :

Type de véhicule Matières extraites sur 200 000 km Détails
Voiture électrique (VE) ~160 kg Métaux de la batterie (lithium, cobalt, nickel, graphite, etc.) - extraits UNE FOIS
Voiture essence/diesel ~12 000 kg Pétrole brut : ~10 000 L (~8 500 kg) à raison de 6 L/100 km
• Extraction de 1 L de pétrole nécessite le déplacement de ~1,2 kg de matière (forage, sables bitumineux, etc.)
Total : ~10 200 kg de pétrole brut + matière déplacée
RAPPORT : Voiture thermique / Voiture électrique x 60-75

Sources : ADEME, IFP Énergies Nouvelles, Transport & Environment, Aurélien Bigo (chercheur IFPEN)

Traduction concrète : Une voiture thermique nécessite l'extraction de 60 à 75 fois plus de matières qu'une voiture électrique sur sa durée de vie. Pourquoi ? Parce que le pétrole est consommé en continu et brûlé (= définitivement perdu), alors que les métaux d'une batterie sont utilisés une fois, puis recyclés à 95%.

📊 Visualisation : Extraction cumulée sur 200 000 km

Voiture ÉLECTRIQUE : ~160 kg de métaux (batterie)

160 kg

Voiture THERMIQUE : ~12 000 kg de pétrole brut + matière

12 000 kg (x 75)

La différence est écrasante : le pétrole brûlé définitivement vs les métaux recyclables

Mais le pétrole, c'est pas pareil, c'est "naturel" non ?

Faux. L'extraction pétrolière est l'une des industries les plus destructrices au monde :

⚠️ Impact de l'extraction pétrolière

  • Déforestation massive en Amazonie, Alberta (Canada), Nigéria
  • Marées noires : Deepwater Horizon (2010), Exxon Valdez (1989), golfe Persique
  • Pollution de l'air et de l'eau : raffinage, torchage du gaz (Nigeria, Irak)
  • Sables bitumineux : destruction de 1 000 km² de forêt boréale au Canada, consommation de 3 barils d'eau pour 1 baril de pétrole
  • Fracturation hydraulique (fracking) : contamination des nappes phréatiques (USA)
  • Travail forcé : système de la Kafala dans les pays du Golfe (cf. article dédié)

Sources : PNUE, Greenpeace, WWF, Human Rights Watch

Et tout ça pour un carburant brûlé définitivement, qui émet 2,3 kg de CO₂ par litre consommé, et qui nécessite une extraction continue pendant des décennies.

Les réserves mondiales : on va manquer ?

Deuxième critique récurrente : "On n'a pas assez de lithium/cobalt/nickel pour remplacer toutes les voitures thermiques !"

État des réserves mondiales prouvées (2024)

Métal Réserves prouvées (millions de tonnes) Production annuelle 2024 Suffisant pour combien de VE ?
Lithium 98 millions de tonnes ~180 000 tonnes/an ~10 milliards de VE
Cobalt 8,3 millions de tonnes ~190 000 tonnes/an ~800 millions de VE
Nickel 130 millions de tonnes ~3,3 millions tonnes/an ~3 milliards de VE
Graphite 1 200 millions de tonnes ~1,3 million tonnes/an ~20 milliards de VE
Pour référence : Parc automobile mondial actuel ~1,4 milliard de véhicules

Sources : USGS (US Geological Survey) 2024, IEA Global EV Outlook 2024, Benchmark Mineral Intelligence

Analyse : Avec les réserves actuelles déjà identifiées, on pourrait fabriquer entre 800 millions et 10 milliards de VE selon le métal limitant (cobalt). Sachant que le parc automobile mondial est de 1,4 milliard de véhicules, il y a largement assez de ressources.

Et ce calcul ne prend PAS en compte :

  • Les nouvelles réserves découvertes chaque année (ex : gisements de lithium en France, Allemagne, Californie, Afghanistan)
  • Le recyclage : 95% des métaux de batterie sont recyclables, créant une "mine urbaine"
  • L'évolution des chimies de batterie : batteries LFP (sans cobalt ni nickel), batteries sodium-ion (sans lithium)
  • La réduction de la taille des batteries : amélioration de l'efficacité énergétique des VE (moins de kWh nécessaires)
  • L'extraction des océans : 230 milliards de tonnes de lithium dissous dans les océans (technologie en développement)

Et pour le pétrole, on en a pour combien de temps ?

Comparons avec les réserves de pétrole :

Ressource Réserves prouvées Consommation annuelle Durée restante
Pétrole 1 732 milliards de barils (BP 2024) ~100 millions barils/jour ~47 ans (au rythme actuel)
Lithium (batteries) 98 millions de tonnes ~180 000 tonnes/an >500 ans (avec recyclage)

Sources : BP Statistical Review 2024, USGS 2024, IEA

Différence fondamentale : Le pétrole est brûlé et perdu définitivement. Les métaux de batterie sont utilisés en boucle fermée grâce au recyclage. Une fois les premières batteries fabriquées, le besoin d'extraction neuve diminue drastiquement.

Le recyclage : l'économie circulaire des batteries

Contrairement au pétrole qui part en fumée, les batteries de VE sont recyclables à 90-95%. C'est un game-changer.

Taux de recyclabilité par métal

Métal Taux de recyclage actuel Objectif UE 2030 Entreprises leaders
Cobalt 95% 90% Umicore, Northvolt, Redwood Materials
Nickel 95% 90% Umicore, Tesla, BASF
Cuivre 99% 95% Veolia, Boliden, Aurubis
Lithium 60-70% 70% Li-Cycle, American Battery Technology, Fortum
Graphite 85-90% 70% Nouveau Monde Graphite, SGL Carbon

Sources : Règlement UE 2023/1542 sur les batteries, Circular Energy Storage, Transport & Environment

Évolution du recyclage : la "mine urbaine"

D'ici 2040, selon une étude de Transport & Environment, l'Europe pourrait couvrir la majorité de ses besoins en métaux de batterie par le recyclage :

♻️ Part des métaux issus du recyclage dans les nouvelles batteries (Europe)

2024
~5%
2030
20-25%
2035
40-50%
2040
60-70%

Sources : Transport & Environment, Circular Energy Storage, BloombergNEF

Pourquoi cette explosion ? Parce que les premières générations massives de VE (2015-2020) arrivent en fin de vie maintenant. Leurs batteries, contenant des dizaines de kg de métaux précieux, deviennent une "mine urbaine" facile à exploiter. Recycler une batterie coûte 40-60% moins cher que d'extraire les métaux neufs.

Les critiques d'Aurore Stéphant et Guillaume Pitron : fact-checking

Aurore Stéphant (ingénieure géologue minière) et Guillaume Pitron (journaliste, auteur de "La guerre des métaux rares") sont devenus les visages de la critique des VE. Leurs interventions (notamment sur Thinkerview) ont été vues des millions de fois. Mais sont-elles factuellement exactes ?

Les principales affirmations et leur vérification

❌ Affirmation 1 (Aurore Stéphant) : "Les impacts environnementaux de l'extraction pour les VE pourraient dépasser les bénéfices climatiques"

✓ Fact-check :

Cette affirmation cite une étude de 2020 au conditionnel qui n'a jamais comparé extraction minière vs impacts environnementaux globaux. L'étude portait sur des scénarios hypothétiques sans données empiriques. En réalité, les études d'Analyse de Cycle de Vie (ACV) montrent que même en prenant en compte l'extraction des métaux, un VE émet 50 à 80% moins de CO₂ qu'un véhicule thermique sur son cycle de vie complet (en Europe avec mix électrique actuel).

Sources : Bon Pote - Fact-checking Aurore Stéphant, Transport & Environment, ADEME

❌ Affirmation 2 (Guillaume Pitron) : "Une voiture électrique pollue autant qu'un diesel"

✓ Fact-check :

Cette affirmation se base sur un calcul erroné de 2017 utilisant des hypothèses obsolètes : mix électrique 100% charbon (Pologne), batterie de 100 kWh (alors que la moyenne européenne est 60 kWh), et 0% de recyclage. En réalité, avec le mix électrique français (96% bas carbone), un VE émet 10 à 15 g CO₂/km vs 130-150 g CO₂/km pour un diesel. Même avec le mix européen moyen (50% fossile), le VE reste 50-70% moins polluant sur l'ensemble du cycle de vie.

Sources : Bon Pote - Fact-checking Guillaume Pitron, ADEME - Analyse du Cycle de Vie

❌ Affirmation 3 (Guillaume Pitron) : "Il faut extraire 250 tonnes de matière pour une batterie de VE"

✓ Fact-check :

Ce chiffre provient d'une étude du Manhattan Institute, think tank pro-fossiles connu pour sa désinformation. Le calcul inclut les déblais miniers (terre, roche stérile) qu'on déplace mais qu'on ne "consomme" pas. Avec la même méthodologie, extraire le pétrole pour une voiture thermique nécessite >500 tonnes de matière déplacée (forage, sables bitumineux). En réalité, la batterie contient 140-200 kg de métaux purs, pas 250 tonnes. C'est une manipulation grossière des chiffres.

Sources : IFP Énergies Nouvelles, Fact-checking par Rodolphe Meyer

⚠️ Affirmation 4 (Les deux) : "L'extraction du lithium consomme énormément d'eau et détruit les écosystèmes"

✓ Fact-check :

Partiellement vrai. L'extraction du lithium par évaporation de saumures (Chili, Argentine) consomme effectivement de l'eau dans des régions arides. MAIS : 1) L'Australie (52% du lithium mondial) utilise des mines de roche dure, pas de saumures, 2) De nouvelles méthodes (extraction directe du lithium - DLE) réduisent la consommation d'eau de 90%, 3) Comparaison : produire 1 kg de lithium = 2 000 L d'eau, produire 1 kg de bœuf = 15 000 L d'eau, produire 1 L de pétrole de sables bitumineux = 3-5 L d'eau douce (sur toute la durée de vie). Les impacts existent, mais ils sont localisés et gérables, contrairement à la combustion de pétrole qui impacte le climat mondial.

Sources : USGS, Water Footprint Network

Pourquoi ces erreurs sont-elles si répandues ?

Plusieurs raisons :

  • Biais de confirmation : Les critiques du VE confirment les préjugés de ceux qui ne veulent pas changer leurs habitudes
  • Cherry-picking de données : Prendre les pires scénarios (Pologne 100% charbon) au lieu des moyennes réelles
  • Absence de comparaison avec l'existant : Critiquer l'extraction du lithium sans jamais mentionner les ravages de l'extraction pétrolière
  • Confusion terminologique : "Terres rares", "métaux rares", "métaux critiques" utilisés de manière interchangeable et erronée
  • Financement et lobbying : Certaines études sont financées par l'industrie fossile (ex : Manhattan Institute, American Petroleum Institute)
  • Médiatisation disproportionnée : Une vidéo Thinkerview avec des erreurs factuelles fait plus de vues que 10 études scientifiques rigoureuses

Conclusion : la transition est réaliste, et moins pire que l'existant

Résumons factuellement :

  1. Les batteries ne contiennent PAS de terres rares. Confusion fréquente avec les métaux comme le lithium, cobalt, nickel (qui ne sont pas des terres rares).
  2. Une batterie contient ~160 kg de métaux. Une voiture thermique consomme ~12 000 kg de pétrole brut sur sa durée de vie. Ratio : x60-75 en faveur du VE.
  3. Les réserves mondiales sont largement suffisantes pour remplacer tout le parc automobile (1,4 milliard de véhicules), même sans découvertes futures.
  4. Les batteries sont recyclables à 90-95%. D'ici 2040, 60-70% des métaux des nouvelles batteries proviendront du recyclage (économie circulaire).
  5. L'impact extraction batterie << impact extraction pétrole, même en prenant le pire scénario. Extraction ponctuelle vs continue.
  6. Les critiques médiatisées (Pitron, Stéphant) contiennent des erreurs factuelles démontrées par les scientifiques (Aurélien Bigo, ADEME, IEA).
  7. La transition n'est pas "parfaite", mais elle est infiniment moins destructrice que le statu quo pétrolier.

Refuser la transition électrique à cause de l'extraction minière, c'est comme refuser les énergies renouvelables parce qu'elles nécessitent du béton pour les éoliennes... tout en acceptant que le charbon et le gaz détruisent le climat.

La vraie question n'est pas "Faut-il passer au VE ?", mais plutôt :

  • Comment réduire la taille des batteries (meilleure efficacité énergétique des VE) ?
  • Comment accélérer le recyclage et l'économie circulaire ?
  • Comment développer des chimies de batterie encore moins gourmandes en métaux critiques (LFP, sodium-ion) ?
  • Comment encadrer l'extraction minière pour qu'elle respecte les droits humains et l'environnement (Règlement UE 2023/1542) ?
  • Comment diversifier les sources d'approvisionnement (Europe, Amérique du Nord) pour réduire la dépendance à la Chine ?

Et surtout : comment cesser d'appliquer des standards différents aux énergies fossiles et aux alternatives ? On scrute chaque gramme de lithium extrait, mais on ignore les 12 000 kg de pétrole brûlés par voiture sur 200 000 km.

Le monde parfait n'existe pas. Mais entre une énergie fossile extraite en continu, brûlée définitivement, qui émet 150 g CO₂/km et détruit le climat... et une batterie fabriquée une fois, utilisée 15-20 ans, recyclée à 95%, qui émet 10-15 g CO₂/km... le choix devrait être évident.

Questions fréquentes (FAQ)

Les batteries de voitures électriques contiennent-elles des "terres rares" ?

Non. Les batteries lithium-ion (NMC, LFP, NCA) ne contiennent aucune terre rare. Elles utilisent du lithium, cobalt, nickel, manganèse, graphite, cuivre et aluminium — qui ne sont PAS des terres rares (groupe de 17 éléments du tableau périodique). Certains moteurs électriques utilisent des aimants permanents avec des terres rares (néodyme, dysprosium), mais de nombreux constructeurs (Renault Zoé, Audi e-Tron, Tesla Model 3 SR+) utilisent des moteurs sans aimants permanents, donc aucune terre rare.

Est-ce qu'une voiture électrique nécessite vraiment moins d'extraction qu'une voiture thermique sur sa durée de vie ?

Oui, absolument. Calcul sur 200 000 km : Une batterie de VE contient ~160 kg de métaux (extraits une fois, recyclables à 95%). Une voiture thermique consomme ~10 000 L de carburant = ~8 500 kg de pétrole raffiné, issus de ~12 000 kg de pétrole brut extrait (ratio extraction/production ~1,2). Résultat : une voiture thermique nécessite 60 à 75 fois plus d'extraction. La différence est écrasante parce que le pétrole est brûlé en continu et perdu définitivement, alors que les métaux de batterie sont utilisés en boucle fermée.

Y a-t-il assez de lithium, cobalt et nickel dans le monde pour remplacer toutes les voitures thermiques ?

Oui, largement. Réserves prouvées (USGS 2024) : Lithium = 98 millions de tonnes (suffisant pour ~10 milliards de VE), Cobalt = 8,3 millions de tonnes (~800 millions de VE), Nickel = 130 millions de tonnes (~3 milliards de VE), Graphite = 1 200 millions de tonnes (~20 milliards de VE). Le parc automobile mondial actuel = 1,4 milliard de véhicules. Donc oui, il y a assez de ressources, même avec le métal le plus limitant (cobalt). Et ce calcul ne prend pas en compte : 1) Les nouvelles découvertes annuelles, 2) Le recyclage (95% des métaux récupérables), 3) Les nouvelles chimies (LFP sans cobalt ni nickel, sodium-ion sans lithium), 4) La réduction de la taille des batteries.

Guillaume Pitron dit qu'il faut extraire "250 tonnes de matière" pour une batterie de VE, c'est vrai ?

Non, c'est une manipulation des chiffres. Ce calcul du Manhattan Institute (think tank pro-fossiles) inclut les déblais miniers (terre et roche stérile qu'on déplace mais qu'on ne "consomme" pas). Avec la même méthodologie, extraire le pétrole pour une voiture thermique nécessite >500 tonnes de matière déplacée (forage, sables bitumineux). En réalité, une batterie de 60 kWh contient 140-200 kg de métaux purs, pas 250 tonnes. De plus, ces métaux sont recyclables à 95%, alors que le pétrole part en fumée. C'est du cherry-picking pour faire peur, sans jamais comparer avec l'existant.

L'extraction du lithium ne consomme-t-elle pas énormément d'eau et détruit les écosystèmes ?

Partiellement vrai, mais contexte important. L'extraction du lithium par évaporation de saumures (Chili, Argentine) consomme de l'eau dans des régions arides (~2 000 L/kg de lithium). MAIS : 1) L'Australie (52% du lithium mondial) utilise des mines de roche dure, pas de saumures, 2) De nouvelles méthodes (DLE - extraction directe) réduisent la consommation d'eau de 90%, 3) Comparaison : 1 kg de bœuf = 15 000 L d'eau, 1 L de pétrole de sables bitumineux = 3-5 L d'eau douce (x 10 000 L sur la vie d'une voiture). Les impacts existent mais sont localisés et gérables, contrairement à la combustion fossile qui impacte le climat mondial. Et rappel : une batterie dure 15-20 ans et se recycle, le pétrole est brûlé chaque semaine.

Le recyclage des batteries, ça marche vraiment ? C'est pas juste du greenwashing ?

Oui, ça marche déjà à échelle industrielle. Taux de recyclage actuels (2024) : Cobalt et Nickel = 95%, Cuivre = 99%, Lithium = 60-70% (en amélioration rapide), Graphite = 85-90%. Des entreprises comme Umicore (Belgique), Northvolt (Suède), Redwood Materials (USA), Li-Cycle (Canada) recyclent déjà des milliers de tonnes de batteries par an. Tesla récupère >90% du nickel, cobalt et cuivre de ses batteries. Le Règlement UE 2023/1542 impose des taux minimum (90% pour Co/Ni dès 2027, 70% pour Li dès 2030) avec sanctions lourdes. D'ici 2040, 60-70% des métaux des nouvelles batteries européennes proviendront du recyclage. Ce n'est pas du greenwashing, c'est une réalité industrielle en pleine croissance.

Pourquoi on ne parle jamais de l'impact environnemental du pétrole alors qu'on critique autant les batteries ?

Biais du statu quo et lobbying. L'industrie pétrolière a 150 ans d'ancienneté, on s'est "habitués" à ses ravages : déforestation massive (Amazonie, Alberta), marées noires (Deepwater Horizon, Exxon Valdez), sables bitumineux (1 000 km² de forêt détruits au Canada), fracturation hydraulique (contamination des nappes), guerres pour le contrôle des ressources, travail forcé (Kafala dans le Golfe), et changement climatique (2,3 kg CO₂/L brûlé). Le VE, étant nouveau, subit un double standard : on scrute chaque gramme de lithium extrait, mais on ignore les 10 000 L de pétrole brûlés par voiture. Résultat : on applique des normes environnementales strictes aux alternatives (Règlement UE batteries), mais pas aux fossiles.

La Chine contrôle la majorité des métaux de batterie, c'est pas dangereux pour notre indépendance ?

Oui, c'est un vrai enjeu, mais des solutions existent. La Chine domine le raffinage (pas tant l'extraction) : 70% du cobalt raffiné, 60% du lithium raffiné, 90% des terres rares (aimants de moteurs). MAIS : 1) L'Europe et les USA développent leurs propres capacités : mines de lithium en France (Imerys), Allemagne (Vulcan Energy), USA (Thacker Pass), Canada, 2) Le recyclage crée une indépendance : d'ici 2040, 60-70% des métaux viendront du recyclage local, 3) Diversification : Australie, Amérique du Sud, Afrique, 4) Nouvelles chimies : LFP (Chine, mais licence libre), sodium-ion (pas de lithium). Comparaison : on importe 99% de notre pétrole de pays instables (Russie, Moyen-Orient, Afrique). Le VE permet de relocaliser la production d'énergie (électricité produite localement).